Claro : pomme C

Claro : pomme C

   Emboîtant le pas à François Bégaudeau ou Arno Bertina, Claro vient de publier “Black Box Beatles” chez Naïve Session. l’histoire d’une noite noire qui contient pas mal d’infos sur les Beatles. Nous avons voulu décrypter avec lui son livre. Propos recueillis par Jean-Marc Grosdemouge

Epiphanies : pas besoin de vous demander si vous êtes fan des Beatles ?

Claro : Je ne dirais pas “fan”. Plutôt “victime consentante”. C’est un virus tenace.

Racontez-moi comment vous avez découvert le groupe…

J’avais acheté le double album bleu, mon premier vinyle. Ma mère m’avait averti que c’était en anglais et que je n’allais rien comprendre, alors elle m’a offert un dictionnaire Harraps. J’ai traduit les chansons en les écoutant. Sur le moment, ça m’a paru normal, évident.

Quel rapport vous entretenez avec ce groupe ?

C’est du compagnonnage. C’est comme de garder sur soi la photo de celui que vous étiez autrefois, avec le même décor derrière, celui de l’enfance éternelle. Comme si le temps s’était arrêté. Ils seront toujours là, comme des potes discrets mais actifs.

Naïve a déjà publié des livres dont les heros sont des rockeurs (Johnny Cash, Mick Jagger) mais dans votre cas, c’est une commande ?

J’avais beaucoup aimé le livre de François Bégaudeau et j’ai contacté Naïve pour leur proposer de faire un livre sur les Beatles, en leur exposant mon projet assez précisément.

Comment vous est venue l’idée de la boite noire ?

J’avais lu quelque part qu’il existait dans l’espace une sorte de disque dur dérivant où on avait mis des tas de sons et d’images, au cas où un jour un pauvre extra-terrestre tomberait dessus. Il m’a vite paru évident que si un E.T. tombait sur les disques des Beatles, il se ferait une drôle d’image de notre monde.

Quand j’étais petit, la première fois que j’ai entendu parler des Beatles, j’ai bien senti dans la façon que les gens avaient de les considérer, que c’était un groupe à part dans l’inconscient. Mme si ce n’est pas formulé texto, ça se sent. Vous êtes d’accord avec ça ?

Oui, les Beatles sont uniques. Pourquoi ? Eh bien justement, cela reste un mystère. Et c’est ce mystère qui les rend mythiques. Il fallait bien un jour qu’un groupe vole le statut d’un dictateur ou d’un messie. C’est tombé sur eux. Ils n’ont pas compris ce qui leur arrivait, nous non plus. Ils sont devenus en quelques mois plus connus que Jésus mais bon, il faut reconnaître que Jésus, au niveau musical, c’est pas tout à fait ça.

Cela vous a influencé dans la manière de penser ce livre ?

Bien sûr. Mon personnage se lance dans une exégèse un peu folle de leurs paroles, tente de re-raconter leurs vies, comme s’il existait une clé, une réponse. Je voulais que cette soif de savoir entraîne un brouillage du fait de la masse grouillante des infos. Plus on veut décrypter, plus ça se brouille et plus la poésie reprend le dessus.

La boite noire analyse autant la vie artistique des Beatles (leurs oeuvres) que leurs vies respectives (ex : l’opération des amygdales de Ringo). Ce sont les Beatles qui marquent le début de la peoplisation de la pop music ?

Je ne pense pas. Elvis avait déjà pas mal défriché le terrain. Le fait qu’il soient quatre a joué en fait un rôle étrange, comme si ça quadricuplait (sic) la curiosité. Comme s’ils représentaient les termes d’une équation, et qu’à force de la recopier on allait finir par la résoudre, et découvrir l’origine absolue de toute gloire. Heureusement qu’ils se sont séparés.

 

Jean-Marc Grosdemouge