Syd Matters : Ce Qu’il A Démontré

Syd Matters : Ce Qu’il A Démontré

   Gagnant du concours “CQFD” organisé par “Les Inrockuptibles”, le parisien Syd Matters démontre que l’on peut être français et parler la langue des meilleurs songwriters pop anglo-saxons. Ce théorème a son corolaire : on peut sortir un disque doux et le jouer sur scène avec un volume élevé sans que ses chansons y perdent de leur caractère soyeux. Euréka !

   A quelques jours de la sortie de son premier album, “A whisper and a sigh”, Jonathan Morali, auteur-compositeur et chanteur à la tête de Syd Matters venait défendre ses chansons sur la scène de la Route du Rock de Saint Malo.
Accompagné du groupe qu’il a formé autour de lui depuis cinq ou six mois, Syd Matters, faisait mentir tous ceux qui pensent que sa musique n’est qu’une rêverie intimiste, à écouter sur disque dans un cadre confiné.
Si son album est tout doux, c’est que Syd Matters a voulu, selon sa propre expression. “essayer de tirer profit d’une contrainte de matériel“. “L’atmosphère fait cinquante pourcent du chanson“, explique-t-il. Alors, il s’est lancé dans une recherche d’insolite, basée sur une certaine économie de moyens. “Quand je compose, poursuit-il, il est important de connaître les limites techniques de mon matériel, et de voir ce que je peux faire dans ces limites”.
D’où un refus des arrangements convenus, qui lui sied bien. Et qui passe fort bien la rampe de la scène, quand le groupe décide de lâcher les chevaux, et délaisse les ballades à la guitares sèches pour un set rock adapté au cadre d’un festival d’été. Propos recueillis par Jean-Marc Grosdemouge

Epiphanies : Je vous ai vus en concert ce printemps eu Sentier des Halles, dans une ambiance intimiste. L’écoute de votre album, qui ressemble à une rêverie m’a conforté dans cette impression. Ici, vous semblez avoir sorti le gros son.

Syd Matters : Nous avons joué pareil. C’est le son qui était fort. Au Sentier des Halles, il y avait peut-être plus de chansons acoustiques, mais on se voyait mal, dans un festival, jouer des chansons à la guitare sèche, même si on le fera sûrement plus tard. Mais nous ne sommes pas assez rôdés. On voulait jouer au groupe de rock. (sourire)

Dans l’affiche de la Route du Rock, tu es le plus jeune de tous. Ça fait quoi d’être le petit dernier ?

Les gens sont guère plus vieux que moi, quand même. Cyann et Ben ne sont pas des vétérans, M83 non plus. S’ils avaient tous quarante ans, je me sentirais le petit dernier, mais là, ce n’est pas le cas…

Le pseudo que tu t’es choisi, et qui est aussi par extension, celui du groupe qui t’accompagne, est-il une référence à Syd Barrett ?

Pas du tout. (sourire) J’ai choisi le nom en vingt minutes. Je devais envoyer des démos et il fallait mettre un nom dessus. J’aime beaucoup Syd Barrett, mais ce n’est pas un truc réfléchi. Syd Matters, sur scène, c’est vraiment “nous”, le groupe, pas juste moi.

On compare, justement ton premier album à Pink Floyd. On parle aussi de Badly Drawn Boy. c’est vrai quee tu portes la barbe (sourire). Ce sont tes références ?

Je suis fan des premiers Pink Floyd. J’aime aussi beaucoup le premier album de Badly Drawn Boy, maintenant ce sont un peu les noms qu’on avait mis dans la bio, donc les gens les ressortent. Ce sont des gens que je respecte, donc ça fait plaisir d’être comparés à eux, mais je ne les écoute pas tous les jours.

Avec “A whisper and a sigh”, on a l’impression d’avoir affaire à un disque moderne, mais avec plein de références du passé. On t’imagine bien avoir une grosse culture musicale, écouter des vieux albums.

Ça vient sûrement du fait qu’on écoute tous des choses différentes. Mais on ne fait pas de la musique d’intellos. On est même plutôt du genre illettrés ! (rire) Le fait d’avoir des cultures musicales différentes est sûrement un des éléments qui font que nous avons beaucoup de plaisir à jouer ensemble… Et ça nous évite aussi de tomber dans certains clichés. Le batteur aime le jazz. Rémi, le guitariste, a joué du reggae, donc il n’a pas de tics de guitariste rock. Mathieu est peut-être celui qui a le plus gros bagage musical, et qui s’apparente le plus à ce que l’on fait : il une culture rock et pop qui remonte assez loin. C’est un vrai amateur de recherche de vinyles et de trucs rares.

Ton premier album n’est pas à considérer comme un hommage à ton Panthéon personnel, à tes cinq disques préférés de tous les temps ?

J’ai fait ce disque seul, donc les influences ressortent de partout, mais je ne l’ai pas fait dans cette optique de montrer ce que tel groupe phare m’a apporté. On ne crée rien à partir de rien, mais il faut faire son truc à soi. Si les influences ressortent, ce n’est pas grave, autant ne pas les cacher. Mais il ne faut pas non plus être écrasé par ces influences.

Tu as participé au concours “CQFD” organisé par “les Inrockuptibles”. Comment as-u vécu le fait qu’une rumeur circule selon laquelle que ta maison de disque aurait fait pression sur le jury ?

Je n’ai pas cherché à participer au concours CQFD. Je ne lis pas “Les Inrocks”, je ne savais pas qu’il y avait un concours d’auto-produits. Quand, en novembre 2002, j’ai eu des titres prêts, je les ai envoyés à des magazines, sur le conseil d’amis. J’ai envoyé des titres aux “Inrocks”. Un mois après, ils m’ont appelé pour me parler de ce concours, alors que j’étais en négociation avec le label Third Side, pour me demander de participer. Je ne voulais pas vraiment, parce que c’st un concours fait pour les auto-produits, et je venais de signer dan un label si minuscule soit-il. Ça m’embête qu’on remette ça sur le tapis, parce que ce sont eux qui sont venus me chercher. Je ne crache pas dans la soupe parce que ça m’a permis de faire une tournée avec “Les Inrocks” et qu’on parle de Syd Matters… En tout cas, Third Side est un label qui commence et n’a aucun moyen de pression. Surtout pas financier ! Mais je remercie “Les Inrocks” de soutenir les jeunes artistes.

S’ils t’ont présenté comme artiste auto-produit alors que tu étais signé, ça ne regarde qu’eux. Dernière question : tu n’es pas parent avec Jacques Morali, célèbre producteur des Village People ?

Absolument pas, je ne le connais pas. (signalons que Jacques Morali est décédé des suites du sida, en 1991, NDR) Il n’est pas de ma famille, c’est bien dommage.

Tu aurais bien aimé qu’il soit de ta famille ? (sourire)

Pourquoi pas ! (sourire) C’est vrai que c’est pas forcément facile à vivre. En tout cas, on m’en a parlé quand j’ai envoyé ma maquette : certains labels me demandaient si j’étais de la famille de Jacques Morali. Pas du tout, désolé ! (sourire)

 

Jean-Marc Grosdemouge