Jackie O Motherfucker "Change"

Jackie O Motherfucker "Change"

Le groupe américain Jackie O’ Motherfucker, qui est un collectif de vingt personnes (né au tout début du duo Nestor Bucket le saxo et To Greenwood le manipulateur) est un groupe dont le nom est embarassant. Il peut prêter à sourire si on ne connait pas ce qu’il fait. Or, quand on connaît ce qu’il fait, on se dit que tout cela est sérieux.

J.O.M. a beau être un groupe au nom… embarrassant, il a tout de même eu les honneurs du magazine “Wire” cet hiver (photo ci-dessous), qui a judicieusement tronqué son nom en une. Et côté musique, le magazine anglais s’y connaît. Il n’y a pas que le nom qui est un peu revêche chez J.O.M. : sa musique, collage blues-jazz-country aussi. Le groupe y incorpore des sons picohés dans une bibliothèque de son, et opère un savant dosage entre une préparation intense avant de se produite, qui laisse place à une improvisation sans limite dès qu’il s’agit de jouer. L’instinct domine.

Le son est lo-fi, la batterie sonne bizarrement, l’harmonica ne se soucie guère de produire une mélodie ample et déliée ; tant pis si ça crachote un peu. Le chant est plaintif et désinvolte, la guitare couine. Prenez un vieux disque country ; posez le sur le tourne-disque, actionnez le bras mécanique ; ça gratouille, c’est un bon début. Chez J.O.M ça gratouille aussi, ça donne des frissons dans le dos parfois. Maintenant, posez votre doigt sur le disque, sans trop insister pour ne pas l’arrêtez. La musique sort alors au ralenti. Voilà un aperçu de la musique de J.O.M., qui fait avec sa musique comme les sales gamins avec leur chewing-gum au bord des lèvres : il s’agit de l’étirer ; l’étirer, en tentant de lui conserver un maximum de tension, sinon, ça baille et c’est moche, et en essayant de tirer la gomme le plus loin possible.

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Jackie O Motherfucker “Change” (Textile Records/Discograph), 2003

première publication : samedi 22 février 2003

Jean-Marc Grosdemouge