Man : one man show

Man : one man show

   Le duo Man est devenu un trio, mais il n’a rien perdu de son talent pour les atmosphères. “Atmosphère ? Atmosphère ? Est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?” pourrait nous dire Charles-Eric Charrier. Mais il n’est pas soupe au lait, plutôt du genre talentueux. Alors écoutons le nous dévoiler les arcanes de “Helping hand” (voir notre article), dernier album du groupe. Propos recueillis par Jean-Marc Grosdemouge

Charles-Eric Charrier : J’ai commencé la musique de manière autodidacte après avoir écouté un disque punk à la fin des seventies et à partir de ce jour je n’ai plus fait que de la musique. C’est pour dire si cela a changé ma vie. Puis les rencontres aidant, j’ai developpé un style à partir de mes erreurs et mon manque de savoir-faire. Rasim Biyikli est aussi autodidacte mais sa formation s’est deroulée à travers la musique classique contemporaine, puis la pop music au sens large. Nous nous sommes rencontrés en 1996 au sein de Dréta Loréli et retrouvés trois ans plus tard pour former Man.

Epiphanies : Vous avez enregistré l’album à trois. Qui est le troisième homme ? Quel est son parcours ?

Anthony Taillard est un musicien autodidacte, tout comme nous. C’est un vrai activiste des scènes de musiques improvisées qui joue dans Formanex et qui a réalisé des multitudes de projets. En ce qui concerne Man, c’est un ami qui est avec nous depuis le début. Il a sorti sur son label le tout premier enregistrement du groupe, un vinyl 25 cm, il a managé le groupe puis est devenu musicien dans Man jusqu’à la réalisation d’”Helping Hand”. D’un point de vue artistique, il est parti réaliser son projet solo.

Sur ce nouvel album de Man, les ambiances partent dans tous les sens… Qui apporte les idées ? Comment travaillez-vous ? A partir d’une mélodie ? D’un sample ?

Il n’y a pas de méthode établie. C’est selon les idées de chacun ou une inspiration externe, mais surtout, nous essayons de suivre nos ressentis respectifs et essayer de les faire converger dans la même direction. Ce qui est important, ce sont les sentiments et le fait d’être aussi proche que possible de nous-mêmes.

Et être proche de vous-mêmes, ça veut dire être multiple ? L’album commence limite dance, et ensuite, par dans d’autres directions…

Oui c’est vrai, mais je pense simplement dans la forme car je crois que l’album forme un tout relevant du même fond ou tout du moins explorant sous ses diverses formes ce fond.

Il y a peu de temps entre deux morceaux, donc ils s’enchainent presque naturellement… Je suppose que c’est voulu…

Oui effectivement. Cela participe de l’intensité et puis la volonté de Rasim était qu’il n’y ait aucun blanc numérique. Vu que l’album traîte de nos activités intimes et humaines il semblait juste de procéder de la sorte.

Le fait qu’il n’y ait pas de paroles, c’est voulu aussi ? A chacun de coller ses propres mots ou ses visions mentales…

Oui. Je pense que c’est une manière intéressante de laisser l’auditeur libre tout en exprimant des choses, des sentiments… Toutefois, il y a énormément de voix sur ce disque ainsi que des paroles et mots dans l’arrière plan.

Cet album ferait une superbe bande originale de film… ou un un beau fond pour une lecture de textes ou de poésie. Personellement, j’écris des nouvelles et c’est totalement le genre de musique qui inspire des émotions qui poussent à gratter du papier. On doit vous le dire souvent ?

Oui, on nous parle souvent de l’aspect “cinématographique” de notre musique. Evidemment cela nous interroge, mais il y a une différence entre le fait qu’une musique provoque des images chez quelqu’un et une musique pour film. Je pense que notre musique relève plutôt du premier postulat. Peut être que les sentiments engendrés (quand c’est le cas) se traduisent en images mentales.

C’est qui la famille de Man ? Moi, je dirais que dans les grand parents il y a Pierre Henry, les parents sont Tortoise, Sonic Youth, Mogwai, et les frères Sylvain Chauveau, Murcof, etc. Pour toi, quelle est cette “famille recomposée” ?

C’est effectivement une grande famille a travers le temps et l’espace. Des gens que tu cites je n’ai écouté que Sylvain, Tortoise et Sonic Youth. Sont-ils des influences ? Oui peut-être… En tout cas pour Sylvain c’est un ami que j’aime beaucoup : en ce sens là, c’est une influence. Pour ce qui est du parallèle souvent exprimé entre nos musique, celà reléve de l’accident ou de l’air du temps ou encore de la même sensibilité puisque nous étions engagés les uns et les autres sur nos voix respectives quand nous nous sommes decouverts. Tortoise a ouvert des portes, ainsi que les Sonic Youth, mais bien d’autres sont importants pour nous tel que Pierre Bastien, Olivier Messiaen, Talk Talk, Gainsbourg, etc. Je pense que notre principale influence, c’est nos vies. Et aussi que la vie des autres nous intéresse.

Si je te dis : tel morceau me fait penser à du Yann Tiersen, tu me pètes la gueule direct ou tu me dis “merci pour le compliment” ?

Ni l’un ni l’autre, c’est ton droit de penser cela. Il est vrai que c’est plus facile de nous trouver des accointances avec Tiersen qu’avec les Sex Pistols. Je trouve quand même cette comparaison pas très juste, mais cela ne me dérange pas.

 

Jean-Marc Grosdemouge