"Il est minuit, Paris s’éveille"
On a honte du procédé, vraiment TROP FACILE, mais nous allons vous parler d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Un temps où la télévision balbutiait en noir et blanc, où la radio régnait encore en maître dans les foyers et où la relation interprète-auditeur ne passait pas par Internet mais par la scène.
Le réseau social d’alors s’appelait cabaret, un maillage parisien de salles minuscules où se produisaient Greco, Brassens, Ferré, Aznavour, et sa Silicon Valley s’appelait Rive Gauche. Aujourd’hui encore si on vous dit milord l’arsouille vous pensez à Gainsbourg et l’Ecluse à Barbara, la chanteuse de minuit, seule au piano.
En ce temps-là on ne mettait pas en ligne son dernier son, mais on pouvait créer une chanson une après-midi et la chanter le soir dans un cabaret, puis un autre, un autre encore et ainsi de suite jusqu’à –si tout allait bien- gagner de quoi payer sa pitance… ou son prochain verre. Henri Gougaud raconte dans ce DVD qu’il a cessé le métier presque sur un coup de tête, en constatant combien nombre de ses confrères sacrifiaient à Bacchus plus qu’il est souhaitable.
Après avoir raconté Paris par le prisme électoral (« Paris à tout prix ») et avant son documentaire sur le journal « Le Monde », en salle depuis peu, il a œuvré à ce doc qui restitue l’ambiance bohème des cabarets d’après-guerre, sorte de parenthèse enchantée entre la guerre et les yéyés, quand la chanson poétique battait le pavé. Gainsbourg a retourné sa veste quand il a compris qu’elle était en vision, toutes les animatrices télés ressemblent à des camionneuses à côté de Denise Glaser et comme le chante Souchon Rive Gauche à Paris « les marchands mal appris viennent vendre leurs habits en librairie. »
A noter la présence d’un DVD bonus plantureux, avec plusieurs heures de chansons et de découvertes (qui connait la chanteuse Gribouille, la Brel au féminin ?) et de sketchs (Dary Cowl, Poiret et Serrault, Noiret et Darras, Lanoux et Richard, Les Frères Ennemis, etc). Rive Gauche à Paris, adieu mon pays ? Il parait que plus la Capitale se boboïse, moins on fait la fête, quel que soit l’arrondissement. Mais dites on ne va quand même pas se mettre à regretter ce temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître ?
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Yves Jeuland “Il est minuit, Paris s’éveille”, 2 DVD (Ina Editions), 2014
[youtube https://www.youtube.com/watch?v=Uo-KUWxsfH0&w=560&h=315]