Frank Lisciandro "James Douglas Morrison"

Frank Lisciandro "James Douglas Morrison"

Compagnon de route du poète et chanteur, Frank Lisciandro livre un témoignage unique sous forme de photos, d’interviews et d’anecdotes. Ce photojournal est un témoignage de première main : Lisciandro ne rapporte que des faits qu’il a vus, et pas ce que la rumeur peut rapporter.

“James Douglas Morrison était un être complexe, formidablement intelligent et talentueux, qui, parfois, evoluait à la lisière de la catastrophe. [Il] aimait la vie et voulait tout essayer. Tout connaître. Certains, qui l’ont peu connu, disent qu’il y avait un désir de mort chez lui ou qu’il était obsédé par la mort – d’autres, qui ne l’ont jamais rencontré, ont même écrit cela. D’après ce que je sais, aucune de ses personnes n’est psychologue ni médecin, ni assez qualifiée pour disgnostiquer la conduite des autres. Mais il semble que ce soit sans importance. Comme Jim était un personnage public, chacun y va de son analyse et tire ses conclusions au petit bonheur”.

Dès l’introduction, l’auteur met les choses au point. Proche de Jim Morrison, le photographe Frank Lisciandro a travaillé avec les Doors de 1968 à 1971. Il a sussi collaboré aux films “Feast of friends” et “HWY”. C’est un donc un témoignage de première main qu’il livre : il ne rapporte que des faits qu’il a vus, et des paroles dont il est sûr (il enregistrait parfois les conversations qu’il avait avec Jim) et non de ce que la rumeur peut rapporter, transporter, déformer, transformer, ou grossir. La rumeur fonctionne toujours mieux avec les rock stars que le commun des mortels, s’amusant à colporter les choses les plus farfelues : on ne compte même plus les légendes urbaines qui ont touché les Beatles (Mc Cartney serait mort depuis trente ans), Elvis (lui serait bien vivant) et les autres.

Dans son introduction, l’auteur de ce livre (paru originellement sous le titre “An hour of magic” et agrémenté ici de photos inédites) prend donc ses distances avec les Freud de backstages et les Lacan de studios. Il nous montre Jim Morrison sur scène (et loue la communion entre le chanteur et son public), sur les plateaux de télévision, dans les aéroports, ou en répétition. Ce jour-là, dans leur atelier, au rez-de-chaussée d’un immeuble de West Hollywood, Paul Rothdchild, qui a produit tous leurs albums, écoute les démos de “L.A. Woman”. Et on lit sur son visage qu’il n’aime pas ce qu’il entend : son langage corporel parle pour lui, explique Lisciandro.

Page après page, on côtoie Jim Morrison dans son intimité, sa créations et dans les déplacements inhérents à tout artiste qui représente son travail sur les routes, mais on se tient à une distance respectueuse de l’artiste. Sans faire écran en Jim et nous, mais sans non plus tourner à l’impudeur, Frank Lisciandro nous permet d’approcher Jim -tantôt bellâtre en pantalon de cuir, tantôt barbu et bedonant, mais il nous permet -et c’est là l’essentiel, de toucher du doigt ses talents littéraires, en allant au besoin fouiller dans ses textes et ses poésies pour mieux nous éclairer sur l’homme.

Si un pélérinage au Père Lachaise n’apprend rien, mais absolument rien sur Jim Morrison, voici un moins un livre qui nous en dit long sur cette popstar à la gueule d’ange. Ne ressemble-t-il pas au Christ sur la couverture de ce livre, le front ainsi ceint de guirlandes fleuries ?

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Frank Lisciandro “James Douglas Morrison” Editions Castor Astral, Paris, 172 pages, 24 euros.

première publication : dimanche 23 octobre 2005 sur M-la-Music.net

Jean-Marc Grosdemouge