Olivier Libaux “L’héroïne au bain”
“Je suis contente d’avoir des nouvelles des Objets. Ils vont bien ?” La scène se déroule à la Fnac Montparnasse lors d’un show-case de Katerine animé par Christophe Comte des “Inrocks.” Katerine vient de parler de sa collaboration au projet d’Olivier Libaux, et cette spectatrice a compris que les Objets (duo auteur de deux albums dans les années 90) se reformaient. Fausse joie.
Fausse joie donc mais vrai plaisir de découvrir Olivier Libaux, qui, séparé de son compère de scène Jérôme Ignatus aura mis sept ans, oui sept ans, à faire aboutir son projet de “conte musical pour adultes”, “L’héroïne au bain.” Une oeuvre en trois actes, et avec deux intermezzo.
Le voici enfin sur galette ce conte digne des films de Jacques Demy, croisement improbable de la violence des films de Stanley Kubrick ou David Lynch et de la pop acidulée de Michel Legrand. Car si l’histoire que conte Libaux est cruelle, rappelons que chez Demy, les histoires sont également tristes : dans “Les parapluies de Cherbourg”, le personnage de Deneuve promet à son ami de l’attendre quand celui-ci part au service militaire en Algérie. Quand il rentre, elle est mariée à un autre. Dans “Les demoiselles de Rochefort”, il y a le personnage du retraité assassin Dutroux. Dans la comédie musicale qui est en préparation, il s’appellera d’ailleurs Tranchant, car après la sinistre affaire Marc Dutroux, ça fait mauvais genre.
Revenons-en à cette “héroïne au bain” : cela pourrait s’écrire “L’héroîne aux Bains” puisque l’action se déroule en partie dans une discothèque, bien qu’il ne soit pas question de substances illicites. D’ailleurs, l’action ne se déroule pas rue du Bourg-l’Abbé, mais dans un petit village de la campagne. Enfin, passons : ce conte est surtout l’occasion de belles retrouvailles : Dominique Dalcan (en narrateur) ouvre le disque, et c’est un plaisir d’entendre la voix de celui qui n’a plus chanté depuis “Ostinato”, puisque qu’il ne chante pas sur les albums de Snooze (son projet électro). Autres voix : Lio, Helena (qui intervient par exemple sur une chanson qui lui fait parler de ses seins, sympa), Michael Von der Heide, et… Ludovic Triaire. Peut-être que certains d’entre vous se souviennent de ce chanteur qui a sorti en 1993 un album chez Barclay. Sur une chanson, “Aston Martin”, il nous invitait à fuir sur les routes anglaises en compagnie de John Steed, Tara King et Emma Peel.
Bien sûr, on ne va pas déflorer l’histoire qui sert de trame narrative à ce conte, ce serait dommage, mais sachez que le charme des ces chansons à la production un peu “eighties” (c’est très tendance, dites-moi) réside en grande partie dans la dichotomie (visiblement clairement assumée) entre d’un côté des paroles horribles et un musique très gaie. Désormais, comme son confrère Dalcan, Olivier Libaux peut se targuer d’être “un artisan dans l’industrie du sentiment.”
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Olivier Libaux “L’héroïne au bain”, 1 CD (Naïve), 2003
première publication : mardi 22 avril 2003