Les mots gris-bleu de Julien Baer
On l’a connu chanteur (quatre albums chez Universal, dont deux chroniqués ici) puis on a entendu dire qu’il écrivait des livres pour la jeunesse. on (re)découvre aujourd’hui Julien Baer écrivant de la poésie pour grands enfants. Une poésie douce amère, illustrée par son ami Philippe Katerine.
Quand on lit un texte écrit, la plupart d’entre nous entendent leur voix réciter les mots. cela s’appelle la subvocalisation. On peut d’ailleurs s’amuser à imiter la voix de quelqu’un : et comme Julien Baer chante, on peut imaginer son timbre, sa voix un peu trainante comme un disque de João Gilberto, sa façon de murmurer. de page en page, c’est une poésie de presque rien qui se déploie, douce amère.
Les lusophones ont un mot pour décrire je cite le “sentiment mélancolique mêlé de rêverie et d’un désir de bonheur imprécis” : c’est la saudade dont il faut impéritivement saupourdrer toute oeuvre de fado ou de bossa nova digne de ce nom.
Julien Baer évolue entre flou et détails minuscules, braque la focale sur un objet, puis dézoome pour caresser un grand concept. Rien de sérieux là dedans, et pourtant on sent une vrai sensibilité, sans emphase, sans grande déclaration.
Les dessins de Katerine vienent appuyer chaque texte, lui donnant souvent un angle inattendu et ce dialogue texte-dessins est très fécond et la lecture de ces poésie est parfois très émouvante. Espérons que ce recueil doit le premier d’une longue série.
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Julien Baer “Les beaux jours et les autres”, Editions Seghers, Paris, 2024, 199 pages, 19 euros.
